Autrement (avec des légumes)
Partant de sa propre expérience dans un GASAP (équivalent belge des AMAP françaises), la réalisatrice Anne Closset nous emmène dans les coulisses de ces réseaux de citoyens « mangeurs » et producteurs qui s’organisent à l’échelle locale comme européenne pour faire bouger les lignes agricoles et alimentaires…
Lorsque je me suis inscrit dans une AMAP il y a un peu plus de deux ans, j’avais simplement envie de me rapprocher de ce que je mangeais. Cela voulait dire manger mieux – bio et bon…-, mais aussi savoir comment et par qui étaient produits les aliments qui me nourrissaient.
Dans un premier temps, je ne réalisais pas que ce faisant, je participais à un mouvement plus large, avec des valeurs, des principes, une vision et des objectifs.
Peu à peu, j’ai appris à connaître « mon » maraîcher et nos autres producteurs partenaires, et j’ai découvert qu’il y avait plus de 2000 AMAP en France, soit plus de 70 000 familles, 200 000 consommateurs qui avaient noués les mêmes relations directes avec quelques 1500 producteurs.
En mars 2014, j’ai vu arriver une toute nouvelle charte, réécrite à travers un processus participatif inter-régional de plus d’un an. Après pratiquement 15 ans d’existence, elle fournissait des bases d’amélioration renouvelées aux pratiques du mouvement, fondées sur la confiance, la transparence, la solidarité, l’équité et le respect de la nature.
J’y ai vu la promesse « en actes » d’un monde meilleur. Et j’ai eu envie de m’investir plus largement, dans mon réseau régional d’abord, puis au sein du Miramap, le mouvement inter-régional.
C’est un parcours similaire que nous raconte en mots et en images Anne Closset dans Autrement (avec des légumes), en partant de son GASAP bruxellois (Groupement d’Achat Solidaire pour l’Agriculture Paysanne).
D’abord à la recherche de légumes sains et goûteux, elle fait la connaissance de ceux et celles qui les produisent, de leurs vision et leurs problématiques, puis découvre le collectif du Réseau des GASAP Bruxellois (représentant 87 groupes, 2000 familles) et les réflexions qui l’animent sur les circuits courts, l’empreinte écologique, les salaires rémunérateurs, la souveraineté alimentaire…
Elle découvre aussi les échanges entre ce Réseau et d’autres Réseaux : l’équivalent des GASAP en Flandres voisines, le Miramap en France, les AIAB en Italie, les ZMAG en Croatie, et URGENCI, le Réseau européen des CSA. L’appellation CSA signifie « Community Supported Agriculture » (agriculture soutenue par la communauté), et englobe tous les mouvements de citoyens qui créent des partenariats directs et durables avec des producteurs.
Lors de son dernier recensement, Urgenci comptabilisait au moins 4000 groupes de CSA dans 16 pays européens, soit près de 465 000 « mangeurs citoyens » et 6 300 fermes. Avec les autres réseaux de CSA existants partout dans le monde, du Japon à l’Amérique du Nord, il apparaît alors que c’est un véritable mouvement de fond qui est en train de s’organiser pour faire évoluer notre système agro-alimentaire. Même si la tâche s’avère aussi pressante qu’immense…
Car si la réalisatrice se fait l’écho d’un espoir justifié en révélant l’ampleur et la maturité de ce mouvement peu connu (et rarement filmé), elle nous montre aussi l’urgence de le voir changer d’échelle.
Bruxelles, où elle réside, est aussi le siège de l’Union Européenne dont près de la moitié du budget (55 mds d’euros) est consacrée à la Politique Agricole Commune (PAC), qui subventionne principalement une agriculture industrielle et chimique aux antipodes de celle que reformulent et recréent ensemble les citoyens des CSA.
La situation est dramatique: 200 000 fermes qui disparaissent chaque année en Europe, des agriculteurs endettés et en détresse, dépendants des subventions et soumis aux diktats de puissantes multinationales, poussés au cannibalisme et au suicide. Sans compter l’impact considérable de cette agriculture dite « conventionnelle » sur le changement climatique…
C’est pour moi la grande réussite de ce film que de montrer avec simplicité et poésie le lien entre nos choix quotidiens, à commencer par notre alimentation, et les enjeux plus larges auxquels nous faisons tous face. Et devant lesquels chacun de nous – chacun de nos JE – détient un pouvoir d’action à travers des engagements simples et responsables.
Les pratiques agricoles ont des conséquences sur la biodiversité, la qualité de l’eau, la santé, les paysages, l’emploi local ou encore le lien social. Elles nous concernent tous. Et le mouvement des CSA nous offre la possibilité de les reprendre en main pour qu’elles répondent à nos attentes.
C’est ce que le très beau film d’Anne Closset montre consciencieusement et joyeusement.
A voir et à montrer autour de nous !
Olivier Lavielle
Amapien aux Mauvaises Herbes des Buttes (Paris 19e), administrateur du Réseau AMAP Ile-de-France et du Miramap.
Autrement (avec des légumes)
Réalisation, image : Anne Closset / Scénario : Anne Closset , Veronika Mabardi / Musiques originales : Max Vandervorst
Produit par Athanor Production asbl, en coproduction avec la RTBF – Unité de Programmes Documentaires
Il est possible de commander le DVD du film au prix unitaire de 16 € (14€ à partir de 10 exemplaires) sur le site de la société de production d’Anne Closset:
http://www.athanor-production.be/content/o%C3%B9-trouver-nos-r%C3%A9alisations
Liens pour aller plus loin :
1 Commande du film Autrement (avec des légumes) d’Anne Closset
http://www.athanor-production.be/content/o%C3%B9-trouver-nos-r%C3%A9alisations
2 Fiche explicative et matériel de promotion du film Autrement (avec des légumes) d’Anne Closset
http://www.athanor-production.be/node/93
3 Urgenci, le Réseau européen des CSA : http://urgenci.net
4 Le mouvement Inter-Régional des AMAP : http://miramap.org
5 Le réseau bruxellois des GASAP : http://www.gasap.be
6 Le réseau italien des AIAB italien : http://www.retegas.org
7 Le réseau des ZMAG croates : http://www.zmag.hr/en
Publié le 12 juin 2015, dans Aurélie Mutel. Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.
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